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La démocratie : apanage des classes économiquement opulentes et politiquement purulentes

 

Dans sa forme antique comme dans sa version moderne, la démocratie, produit d’une société marquée par la guerre de classes, est le mode de gouvernement élaboré par les classes dominantes pour administrer pacifiquement leurs conflits, gérer politiquement leurs intérêts économiques. À l’époque grecque antique, berceau de son éclosion, la démocratie, qui n’eut qu’une existence éphémère, ne s’appliquait qu’aux hommes libres. Elle était exercée exclusivement par les hommes libres, en l’espèce une portion infime de la population. 

En effet, la majorité de la population laborieuse (les esclaves, métèques, prolétaires et paysans) était exclue du jeu et des enjeux « démocratiques » des propriétaires d’esclaves. Qui plus est, si la démocratie fut inventée pour les « citoyens » libres afin de s’administrer directement eux-mêmes, l’exercice effective de cette liberté fut permis par leur affranchissement de l’obligation de travailler : le travail étant assuré par les seuls esclaves. Par conséquent, à l’époque antique grecque, déjà la démocratie était fallacieuse. Ce fut une démocratie d’argent, elle avait une caractéristique « aristocratique » manifeste, autrement dit un caractère de classe. Les classes laborieuses étaient exclues du pouvoir « législatif », à plus forte raison bannies du pouvoir exécutif, apanage des classes possédantes. 

Plus tard, avec les révolutions bourgeoises anglaise, américaine et française, la remise sur la scène historique de la démocratie comme mode de désignation des saltimbanques politiques préposés à l’administration des intérêts économiques des riches ne fut pas le fruit du hasard, un accident de parcours de l’Histoire. La démocratie bourgeoise s’imposa d’emblée comme la forme de domination politique la plus efficiente et la plus durable, en ce qu’elle associe l’esclave-salarié, baptisé par euphémisme citoyen, au choix politiques de ses maîtres. Cette forme d’organisation politique de gouvernance est la plus idoine pour protéger les intérêts économiques de la bourgeoisie, défendus par des mercenaires politiciens fabriqués par les puissances financières.

À cet égard, il est important de relever que la sphère économique est paradoxalement exclue du scrutin démocratique. Voit-on un banquier, un patron de conglomérat industriel élu au vote universel ? L’économie – le capital et sa reproduction élargie –, propriété exclusive de la minoritaire classe capitaliste, ces négriers des temps modernes, ne fait l’objet d’aucune forme de gouvernance démocratique. Les dirigeants d’entreprise, ces propriétaires d’esclaves-salariés de notre époque civilisée, ne sont jamais élus démocratiquement par les travailleurs mais désignés discrétionnairement par les détenteurs de capital. L’entreprise, lieu de production des richesses et matrice de la reproduction de la vie, n’est pas soumise à une gestion coopérative démocratique mais à un management dictatorial patronal exercé contre les salariés, à qui il n’est pas permis de s’immiscer dans les affaires de l’entreprise à capital privé ou public.
À ses débuts, de la fin du XVIIIème siècle jusqu’à la fin du XIXème siècle, la démocratie bourgeoise fut élitaire, « mandarinale », socialement ségrégationniste, politiquement aliénante. En effet, les classes bourgeoises dominantes en phase de consolidation de leur pouvoir politique et étatique, plus honnêtes que leurs descendantes contemporaines relativement à la caractéristique sociale inégalitaire de leur société de classe, ne se trompaient pas (et ne trompaient pas le peuple opprimé) sur la visée réelle de leur démocratie inique. 

D’emblée, leur démocratie fut placée sous le signe de la propriété privée, de l’opulence, apparentée à la richesse. Aussi, pour être éligible et électeur, fallait-il posséder un grand patrimoine, s’acquitter d’impôts élevés, en un mot être riche. Cette démocratie des riches était symbolisée par le suffrage censitaire.

L’institutionnalisation du suffrage universel est récente. Ce mode de scrutin fut instauré sous la pression des révoltes populaires en lutte pour bénéficier (croyaient-ils) des mêmes droits parlementaires que les classes possédantes. Sous l’instigation des classes populaires fréquemment en révolte, les classes dominantes furent contraintes d’instituer le suffrage universel. 

Dès le XIXème siècle, après avoir consolidé sa domination totalitaire sur la société, pour mieux mystifier le peuple, en particulier dans les pays développés en proie à l’âpreté de la lutte des classes, la bourgeoisie eut l’ingénieuse idée d’associer électoralement (non politiquement ni économiquement : la différence est importante) le peuple à son système régalien de gouvernance. 
Mais à une condition fondamentale : à aucun moment ce « privilège électoral », formellement concédé par les représentants du capital, ne doit servir de tremplin aux classes populaires pour remettre en cause la hiérarchie des pouvoirs de la société de classe, ni le mode de production capitaliste. Autrement dit, le suffrage universel constitue, depuis sa création, une mascarade électorale, permettant d’associer les prolétaires à la reproduction sociale de leur exploitation et aliénation. 

Historiquement, le droit de vote fut concédé avec parcimonie, de manière graduelle, aux différentes couches sociales de la société, des propriétaires fonciers jusqu’aux couches populaires en passant par les paysans et les femmes sans emploi. L’expérience électorale élargie ayant été concluante – à savoir qu’aucune formation politique, y compris radicale, ne profitait de cette fenêtre d’opportunité « démocratique » pour contester l’ordre établi et s’emparer du pouvoir parlementaire et exécutif en vue de promouvoir les intérêts du salariat au détriment des intérêts du capital –, la bourgeoisie se convainquit de l’utilité politique du suffrage universel, lui assurant toutes les garanties de pérennité de sa domination économique et politique.

Parallèlement, l’irruption menaçante du prolétariat sur la scène politique, allait contraindre la bourgeoisie à changer son fusil d’épaule : à ne plus l’épauler contre les prolétaires souvent en lutte, en insurrection. Aussi, pour mieux museler le mouvement socialiste subversif naissant (autrement dit, acheter la paix sociale), avait-elle discerné tout l’intérêt qu’elle pouvait tirer de la participation des partis ouvriers (longtemps interdits) aux mascarades électorales. La bourgeoisie consentit à intégrer les partis socialistes et communistes au cirque électoral pour mieux les corrompre de l’intérieur, c’est-à-dire les vider de leur substance révolutionnaire en transformant leurs dirigeants en mandarins parlementaires dotés de substantiels appointements. Elle y est parvenue, à observer la mutation des partis ouvriers qui troquèrent la révolution contre le parlementarisme. Cette transmutation militante donna naissance au Réformisme, cette naïve croyance qu’on peut améliorer la condition de l’ouvrier en faisant l’économie de la Révolution. Aujourd’hui, avec la paupérisation absolue de l’ensemble des prolétaires du monde entier, l’histoire dément les élucubrations des réformistes sur le prétendu caractère progressiste du capitalisme, ou la nature démocratique des institutions gouvernementales et parlementaires censément définitivement établie. Ces institutions, politiquement purulentes, sont actuellement dans tous les pays en voie de durcissement autoritaire, autrement dit de transition dictatoriale.

Cette concession « démocratique » constitua une imposture « électoraliste » dictée par le grand capital à la gauche collaborationniste pour lui permettre de se crédibiliser auprès des ouvriers et de dévoyer la gronde du prolétariat pressuré. Ce fut le début de l’aliénation citoyenne, autrement dit l’esquisse de la dépossession du collectif réel combatif au profit du citoyen abstrait atomisé. 
Ainsi, en lieu et place de la satisfaction des revendications sociales portant notamment sur la hausse des salaires, la diminution du temps de travail, globalement l’amélioration des conditions de vie, la bourgeoisie concéda-t-elle opportunément la généralisation du suffrage universel. En lieu et place de la répartition égalitaire des richesses, procéda-t-elle à la distribution régulière des bulletins de vote à la plèbe affamée, sous les ovations complaisantes des bureaucrates syndicaux ravis de leur collaboration traîtresse et l’approbation perfide des partis ouvriers parlementaires infatués de leur allégeance. À l’instar des pays du Tiers-monde, notamment d’Afrique et du Maghreb, où la « démocratie » de papier fut généreusement octroyée au peuple misérable en lieu et place de besoins sociaux essentiels. Sans conteste, la démocratie bourgeoise est l’apothéose de l’aliénation.

À la vérité, depuis son apparition, la démocratie parlementaire n’a jamais concerné les classes dominées, si ce n’est pour être sollicitées périodiquement, au moyen de campagnes électorales racoleuses, aux fins de déposer un bulletin de vote dans l’urne, au nom évocateur tant elle symbolise le réceptacle mortuaire des illusions déposées par l’ensemble des classes populaires enterrées socialement vivantes.
À plus forte raison, la démocratie constitue un efficace adjuvant politique prescrit aux dociles citoyens comme antidote à leur misère sociale, citoyens reconnaissants pour ce « privilège électoral » généreusement octroyé par le pouvoir dominant. Ces dociles citoyens sont satisfaits d’élire leurs représentants respectifs (mais point respectables) aux prétendues différentes casquettes politiques, mais en vrai à l’alternative électorale réduite au choix entre le candidat de la droite du capital et le candidat de la gauche du capital (pour l’Algérie : candidat de la nomenklatura kleptomane FLNèsque et de la confrérie mafieuse et séditieuse islamique). 
Sans conteste, la démocratie bourgeoise a toujours revêtu un caractère de classe. Les mascarades électorales ont toujours été une affaire de riches par lesquelles chaque fraction (clan) de la classe dominante tente d’accaparer les leviers de l’État pour l’exercer à son profit. Mais la démocratie bourgeoise est en crise. 

Aussi, avec la discréditation de la démocratie financière et l’impossibilité d’instaurer une dictature à visage clairement fasciste, en Occident le capital œuvre à l’établissement d’un régime oligarchique, c’est-à-dire « un système d’organisation politique dans lequel un petit nombre de personnes concentrent et se partagent les pouvoirs économique, politique et médiatique et discutent entre eux des décisions à prendre pour la collectivité », comme l’écrit Hervé Kempf, auteur du livre « L’oligarchie, ça suffit, vive la démocratie». 
En France, le Conseil de défense, devenu instance suprême de gouvernance instituée par Macron, symbolise cette dérive oligarchique et despotique du pouvoir. 
Les oligarques appartiennent à la catégorie des hyper-riches. De nos jours, c’est au sein de cette fraction de la classe possédante que se recrutent les décideurs politiques (ministres, conseillers, députés, sénateurs, PDG des grandes entreprises publiques). Issus des grandes écoles, ces oligarques débutent leur carrière dans les instances étatiques, avant de se hisser à la direction d’une banque ou d’une multinationale (ou l’inverse). Souvent, ils reprennent du service dans la politique, notamment en qualité de député, maire ou ministre. Ainsi, cette rotation professionnelle entre secteur privé et public permet à ces oligarques de fortifier et de fructifier leur fortune et puissance. Par exemple, un PDG, nommé ministre (ou placé par le capital à un poste stratégique), ne manquera pas de favoriser le secteur de son ancienne entreprise ou le secteur de telle société au sein de laquelle il escompte siéger à la direction.

Au reste, à notre époque dominée par les oligarques, même les présidents sont également devenus de simples administrateurs de l’État. L’État, lui-même, métamorphosé en simple rouage assujetti au Grand capital mondialisé et oligarchique. De fait, chaque pays s’est mué en simple société anonyme dirigée par un PDG-président asservi au capital mondial apatride. Le pouvoir étatique est devenu à tel point impuissant qu’il est soumis, comme un vulgaire salarié, aux appréciations des agences de notations financières chargées de distribuer les notes d’évaluation de la gestion du pays. La moindre mauvaise note en matière économique et budgétaire, et s’en est fini du pouvoir en particulier, et du pays en général. Pris en otage, le pays se voit parachuter un nouvel oligarque-président, imposer une nouvelle classe dirigeante (caste oligarque affligeante) constituée de mercenaires politiciens, fabriqués par les puissances financières entièrement contrôlées par le grand capital mondial. 

À la manière du régime de Macron intronisé à l’Élysée par le grand capital, devenu, à la faveur de la pandémie politiquement instrumentalisée et de la crise énergétique orchestrée, et surtout de la gestion répressive et punitive des Gilets jaunes, démospotique, cette nouvelle forme de gouvernance fondée électoralement sur la démocratie mais gouvernementalement sur le despotisme. 
Le démospotisme, c’est ce mode de gouvernance qui a l’apparence de la démocratie par l’élection, mais le vrai visage du despotisme par la gestion étatique. Cette gouvernance oligarchique prétend être vaccinée contre la tyrannie, immunisée contre le fascisme. Mais elle renferme au vrai toutes les caractéristiques pathologiques du totalitarisme asymptotique, ce virus despotique, invisibilisé par la subliminale propagande médiatique autocratique. Ce système démospotique viral se propage sur tout le corps social, désormais immergé dans la nauséabonde boue de la servitude volontaire.


 

 

 

 

 

 

 

 

 

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